« Je suis Breton, du Morbihan. J’ai étudié à Rennes, et je suis devenu parisien pour des raisons professionnelles. Un jour, j’ai rendu visite à un vieil ami anglais retiré en Ardèche. C’était un ami extraordinaire, un peu original mais d’une grande culture. C’était un prêtre, un protestant converti. Puisqu’il parlait sept ou huit langues, il intéressait beaucoup le clergé anglais, et avait été envoyé faire son séminaire à Rome ; mais il avait quitté l’Angleterre après sa conversion car la liturgie anglicane lui rappelait trop le protestantisme. Il avait choisi l’Ardèche, et Viviers, pour une raison tout à fait particulière : la ville était, pour lui, à mi-chemin entre Londres et Rome. Lorsque je lui ai rendu visite, j’ai aperçu à côté de sa maison une ancienne maison de chanoine. Elle avait été bâtie à la fin du 15ème siècle sur l’emplacement d’une maison plus ancienne, datant du 12ème siècle, où vivait alors un chanoine appelé Sampzon. ‘La Maison de Sampzon’. C’était le premier édifice bâti au pied de la tour de la cathédrale. C’est ce qui m’a immédiatement attiré : cette tour de cathédrale posée dans le jardin, de façon tout à fait extraordinaire. Cela me semblait un réel petit décor de théâtre. À l’époque, la maison était une ruine laissée à l’abandon, sans toit ni porte ni fenêtre. En voyant son état d’abandon, et la beauté du site et de son environnement, je n’ai pas pu résister. Moi qui étais venu visiter mon ami anglais pour le week-end, je suis tombé sous le charme du lieu, tout à fait par hasard ; dès le lendemain, j’ai acheté la maison à l’évêché, mon ami est devenu mon voisin, et cinquante ans plus tard j’y vis encore.  »

(Viviers, Ardèche, 07)

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