





L’usine Cosserat
Le patrimoine : L’usine Cosserat, un lieu emblématique de la production de velours. Fondée en 1794, elle atteint son apogée au XIXe siècle. Jusqu’à 1 100 ouvriers y sont employés : la salle de 500 métiers est un témoin de l’essor de cette activité textile.
Le territoire : Somme, Amiens, 200 rue Maberly (80 000)
L’habitant qui vous en parle : Yves Benoît, ingénieur textile spécialisé dans la teinture et en impression, président de l’association Bleu de Cocagne
L’histoire d’Yves
« Issu d’une famille de teinturiers sur cinq générations, je n’ai jamais pu rentrer chez Cosserat, sauf pour le bicentenaire en 1994. Certaines machines étaient bâchées, on ne voyait pas tout – mais suffisamment pour être content de cette découverte. Pour moi, industriel à Amiens, l’usine Cosserat était un monde fermé. Personne n’y entrait. Dans l’usine, il y avait beaucoup d’inventions quotidiennes, “des tours de main”, mais pas de brevets : on ne faisait pas sortir les idées. À l’intérieur, il y avait des cloisons, des portes, des serrures ! Parfois, j’avais accès à du matériel pour réparer certains velours, mais toujours sous contrôle. Et aucun ouvrier ne connaissait le cycle complet du velours, qui comportait jusqu’à 42 opérations…
Les bâtiments de l’usine Cosserat datent de deux époques : la première usine de 1856 et la seconde de 1885. C’est là qu’on trouve la cathédrale, la salle qui abritait la machine à vapeur sous une verrière à 20 mètres de haut. Si les lieux sont aussi beaux, c’est parce qu’il y avait dans la famille Cosserat un architecte ! Entre 1856 et 1885, l’évolution des techniques de construction est rapide. Cosserat n’hésite pas à détruire l’existant pour construire plus exploitable. Grâce à une charpente en acier, les ateliers gagnent en confort, notamment pour les implantations de machines et les manutentions grâce à des espaces plus larges. On trouve aussi deux bâtiments américains, datant de la guerre 14, qui encadrent sur la Place d’Armes le monument aux morts – le seul exemple dans une usine en France. J’ai aussi travaillé dans l’atelier de teinture, car l’eau qui passe au pied de l’usine est excellente.
Quand l’usine Cosserat a fermé définitivement en 2012, nous avons gardé un exemplaire de chaque machine. Aujourd’hui, la Manufacture Bonvallet continue de produire, dans les bâtiments d’en face, des velours d’ameublement : teinture, gaufrage et impression en relief. Alexandre Bonvallet, c’est l’inventeur de l’impression au rouleau gravé en creux, datant de 1775 : un véritable savoir-faire ! Avec mon fils, nous avons remis en œuvre un procédé d’impression du XVIIIe siècle sur planche de cuivre. Nous n’y sommes parvenus qu’au terme de plus de 500 essais, car il n’existait plus aucune mémoire.”

– Yves

Pour en savoir plus
L’association d’Yves : Bleu de Cocagne a pour objectif de transmettre les savoir-faire liés aux velours et aux grandes inventions textiles Picardes. Actuellement, nous remettons en service la dernière machine à imprimer au rouleau d’Europe pour conserver des savoir-faire en péril : celui de la conduite de cette machine et celui de la gravure sur cylindre. Et avec, un produit : les toiles imprimées avec une gravure en taille douce, d’une qualité artistique inégalable, même avec les techniques actuelles. Cette entreprise a déjà mobilisé 9 000 heures de travail bénévole et près de 240 000 € de partenariat.
Apporter sa pierre à l’édifice
Pour soutenir l’action de préservation du patrimoine industriel et du savoir-faire textile de la Somme menée par Yves et d’autres, vous pouvez verser un don à l’association Bleu de Cocagne en suivant ce lien :
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