“Quand ils ont été là-haut, et qu’ils ont vu cet immense toit de chêne surmonté d’ardoises, il y en a quelques-uns qui sont restés sidérés.”
Denise






L’église Saint-Girons
Le patrimoine : L’église Saint-Girons est la plus grande église gothique du Béarn. Elle est connue pour son imposante charpente en cœurs de chênes. Sa construction débute en 1464 et s’achève seulement en 1530 ! Elle est classée aux Monuments historiques depuis 1913.
Le territoire : située à Monein, dans les Pyrénées-Atlantiques (64360).
L’habitante qui vous en parle : Denise Riuné-Lacabe, retraitée, ancienne professeure d’histoire-géographie au collège Jean Sarrailh de Monein.
L’histoire de Denise
« Enfant, elle me paraissait être une église comme une autre. Ce n’est que plus tard, quand j’en ai connu d’autres, et que j’ai évolué en âge, que j’ai trouvé assez étonnant qu’une communauté comme Monein ait pu construire un aussi énorme bâtiment, et beau de surcroît.
C’est le village qui a construit l’église. Cela m’a amené à me poser la question : quand et qui a payé une chose pareille ? J’ai trouvé des réponses dans les années 1978/1980. J’étais alors enseignante en histoire-géographie au collège de Monein. Les élèves étant libérés de tous les cours habituels le mardi après-midi, les professeurs ont dû choisir des thèmes pour les faire travailler de façon différente. Beaucoup de mes collègues féminines ont donc pratiqué l’éducation physique ou des activités manuelles. Étant assez nulle dans ces domaines, j’ai proposé aux élèves de quatrième d’étudier l’église de Monein, en argumentant que ce serait passionnant. Je leur avais dit que, peut-être, certains grand-parents ou arrière-grand-parents pourraient nous aider.
J’avais vingt-cinq élèves, des quatrièmes et quelques troisièmes également. On s’est lancés là-dedans. Je ne savais pas trop où on allait parce que je n’avais jamais fait une chose pareille. Notre première sortie a été aux archives départementales à Pau. Nous avons vu l’extrême richesse des archives de Monein. Au XVIIIe siècle, on écrivait très bien à Monein mais pas en français. On parlait l’occitan et, plus exactement, le béarnais. Nous avons réussi à déchiffrer, à lire, et quelques fois, quand nous ne comprenions pas des mots, nous avions des enfants qui le montraient aux grand-parents. Dans une famille, un grand-père qui avait environ quatre-vingt-cinq ans, nous a beaucoup aidés dans les traductions.
D’abord, c’était prévu du mois de septembre jusqu’au mois de février, mais là il n’était plus question d’arrêter. Au contraire, on a eu une vingtaine d’élèves en plus, et d’autres professeurs se sont ajoutés au projet. Avec le groupe de mes élèves, on a choisi de leur faire étudier l’évolution de la population : naissances, mariages, décès, quels jours, pourquoi ? Des questions auxquelles je n’avais pas pensé ont surgi : quelle était la population de Monein – ce qu’on y cultivait ? pourquoi construire ?
C’est un travail qui a été très agréable. Pour parfaire nos recherches, nous avons visité l’église. Les élèves la connaissaient pour y être déjà allés – certains y avaient fait la communion – mais, aucun n’était monté à ce qu’ils appelaient « le grenier », c’est-à-dire à la charpente. Je l’avais visité plusieurs fois, alors je leur ai dit qu’ils auraient une grosse surprise. Quand ils ont été là-haut, et qu’ils ont vu cet immense toit de chêne surmonté d’ardoises, il y en a quelques-uns qui sont restés sidérés. Et je me souviens, particulièrement, d’un élève qui s’est mis à pleurer ; il est, plus tard, devenu charpentier.
Le travail fini, nous avons lu nos recherches à la mairie et au foyer rural lors d’une soirée culturelle: à chaque fois, la salle était comble. Belle récompense pour des collégiens ! »

– Denise
L‘anecdote de Denise
Le retour de l’élève charpentier
Quelques années plus tard, cet élève m’a téléphonée. Il m’a dit : « J’ai deux jours de congé là, je voudrais remonter à la charpente. Si ça ne vous ennuie pas, vous ne voudriez pas revenir avec moi ? ». Bien-sûr, j’ai accepté. Mais du temps avait passé, il avait trente ans et, moi, j’étais désormais à la retraite ! Pourquoi voulait-il la revoir avec moi ? Il avait une réponse : « Vous nous aviez dit qu’il y avait un millier de chênes mais j’aimerais bien savoir combien il y en a exactement. Alors, si vous voulez, je vais venir les compter. » Alors il est venu et il est arrivé à 1 400 chênes… Une grande forêt !
Explorer à son tour
Vous pouvez entrer dans l’église gratuitement tous les jours. L’office de tourisme propose des visites guidées (tarifées) qui donnent accès à la charpente.
En savoir plus
Un peu d’histoire autour de l’église et de sa charpente :
Petite lecture
Pour une “visite” virtuelle de l’église par la lecture :
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